" LES RÉPÉTITIONS "
de lecture à haute voix
(Répéter : du lat. repetere, aller chercher de nouveau)
EXPRESSION ORALE, INTERPRÉTATION
La Scène Déménage a proposé à Paùla de Oliveira d’animer des séances de "Répétitions de lecture à haute voix" pour lecteurs de tous horizons souhaitant se confronter à l’exercice. Le texte suivant décrit sa démarche.
Nous nous retrouverons pour travailler deux jours, samedi et dimanche, de 12h30 à 19h.
C’est un travail qui demande une concentration suffisamment intense pour ne pas enchaîner les heures sans une pause substantielle : une cuisine attenante nous permet de préparer thé ou café.
Nous travaillerons en petit groupe : pas trop nombreux pour que le temps soit laissé à chacun·e d’explorer sa propre voix, mais suffisamment pour créer la tension d’écoute, la chambre d’échos d’un auditoire.
Je demande à chaque participant d’apporter un texte littéraire de son choix. Nous ne chercherons pas à commenter l’originalité ou de la subtilité des choix. Il s’agit avant tout pour chacun de pouvoir « s’appuyer » sur un texte avec lequel il se sent suffisamment d’affinités électives pour tenter de le faire entendre.
Il n’y a donc aucun registre à exclure. Je peux simplement suggérer d’éviter les textes très dialogués, ou le théâtre, qui risqueraient de nous entraîner trop tôt dans des problématiques d’ interprétation prématurées. Bien sûr, plus l'épaisseur textuelle, littéraire, sera forte, plus riche pourra être notre exploration, le choix thématique important peu.
Je me charge quant à moi de vous proposer certains textes qui nous permettront d’une part d’explorer certaines difficultés techniques, d’autre part de nous déplacer d’un territoire trop familier.
Nous tenterons ainsi d’explorer comment les liens intimes que nous entretenons avec notre langue sont mêlés à la conscience quand nous tentons de la faire entendre.
Je me hâte de vous dire que toutes nos "particularités", physiques, psychiques, langagières, toutes nos retenues, pudeurs, bref, tout ce qui constitue notre singularité, recèlent précisément nos plus belles capacités d’interprétation. Il ne s’agit pas de trouver une voix "normée", mais bien de rendre audible la voix singulière de chacun·e.
S’il n’existe pas à mon sens de « trucs » — qui deviennent vite des « tics » — il existe bien un travail de prise de conscience du corps et de la voix dans l’espace : on lit aussi bien avec ses pieds, c’est-à-dire avec la posture, qui détermine le souffle.
L’écoute attentive de ses propres rythmes de respiration et de phrasé ; le placement du corps, du souffle, de la voix : tout cela suppose d’explorer ses propres mesures - le trop / le pas assez, le murmure / l’articulation, l’immobilité / le mouvement, la proximité / l’éloignement - dans un espace, de développer en quelque sorte l’attention « incarnée » de notre parole au cercle de l’auditoire.
Mais c’est bien l’exploration orale de la complexité d’un texte littéraire qui nous permet de travailler à relier sons et sens, exploration langagière et traduction sensible. Plus un texte est riche de sens, plus son articulation orale déploie nos ressources d’expression et d’interprétation.
Ce sont ces aller-retours constants entre sons et sens qui nous déplient, nous articulent et nous rendent audibles.
J’espère que ces deux jours permettront à chacun·e de repartir avec quelques repères personnels, quelques indices intérieurs, d’entendre quelque chose de sa propre singularité langagière et de s’ouvrir à cette exploration, si riche de résonances, que constitue la lecture à voix haute d’un texte écrit, à l’attention d’un autre que soi-même.
Paula de Oliveira